Des
animaux fous, fous, fous Depuis quelques années, la production lettone s'avère être très active. Mais au-delà d'une simple effervescence créatrice, les petites perles animées sont légion. De cette profusion artistique émerge principalement un nom : Janis CIMERMANIS, à qui l'on doit cette compilation intitulée Des Animaux fous, fous, fous... à juste titre.
Ces sketches, d'une grande simplicité thématique, détonnent par leur aspect désopilant, sonnant toutefois très juste et lorgnant même parfois vers l'émotion pure (à l'image de cette séquence où le corbeau croit son ami disparu à jamais). Le tigre Calamazoo et l'oiseau marabout Councel (un corbeau), protagonistes récurrents de ces petites saynètes situées au cœur d'une jungle éminemment sympathique, sont deux joyeux larrons auxquels les animateurs ont donné un aspect anthropomorphique, d'où résulte ainsi un croisement improbable entre une simplicité propre à l'être humain (pêche, goûter entre amis) et la complexité des rapports animaux (telle espèce ne cotoie pas telle autre...). Tandis que l'on aurait a priori tendance à attribuer le 'gêne' de la complexité au genre humain... Mais ce n'est pas le seul paradoxe amusant de cette production animée, qui aime prendre à contre-sens des chemins mille fois balisés. Mais revenons à nos deux bêtes à poils, qui prennent tour à tour sous leur responsabilité un pauvre petit oisillon abandonné (épisode Le bébé oiseau) ; lorsqu’ils ne se chamaillent pas entre eux dès le réveil, se déclarant la guerre avant d’unir leurs efforts pour se sortir d’une mauvaise passe (épisode Le matin) ! Avec souvent une même motivation : chasser les intrus indésirables de chez soi, quels qu'ils soient : voleur sans vergogne, vers rongeurs de tronc d'arbre (en l'occurrence la maison de ratons-laveurs), ou même amis venus en vacances… et dévastant au grand dam des habitants la petite masure si soigneusement aménagée ! Mais là où précisément la morale reste sauve, c'est que l'adage "tel est pris qui croyait prendre" est plus d'une fois respecté. Nul crainte donc de pervertir nos chères têtes blondes avec ce programme gentiment subversif. Le public enfantin n'étant une cible nullement écartée, la leçon de vie à retirer du programme demeure toujours sauve, même si les moyens pour y parvenir sont aussi loufoques que les animaux qui peuplent cet univers. Réalisés de 1996 à 2000, la force de ces sept courts-métrages demeurent enfin leur caractère universellement compréhensibles (outre les valeurs véhiculées, ces sketches sont destinés à une large diffusion, les dialogues ayant été remplacés par des borborygmes significatifs). Le message est clair, les intervenants jouissent d’un fort capital sympathie, et les musiques guillerettes sont des plus entraînantes… Bref, tout concourt à faire de ce programme letton un produit réservé aux plus jeunes spectateurs. Mais ce serait faire l'impasse sur la réjouissante cruauté contenue dans ces petites histoires, à laquelle il faut ajouter un humour non-sensique assumé encore plus enthousiasmant. Outre les démarches et autres mimiques irrésistibles des multiples personnages (yeux globuleux, gestuelle balourde, cris ridicules… avec une palme aux lapins, qui déclenchent l'hilarité à chaque apparition), certaines situations relèvent presque du plus pur humour british ! Ainsi, ce lapin malencontreusement frappé par le tigre reçoit-il une tablette de chocolat en guise d'excuse, tablette qu'il avale d'une bouchée sans sourciller, sous le museau dépité de ses congénères… Ou bien encore cet âne un brin ahuri, qui se prend pour un gondolier vénitien, alors qu'il a pris place sur un bus de fortune qui se débrouille bien pour rouler sans son aide (épisode Bonjour les sauvages, par ailleurs l'un des tous meilleurs). Et ce genre de situations absurdes se comptent par dizaine dans chaque court-métrage de cette série injustement méconnue… au point que voir cette coccinelle, apprivoisée par une taupe et enfermée dans une cage, chantant O sole mio, ne vous surprendra même plus ! Les autochtones de ces Animaux fous, fous, fous sont donc les dignes héritiers de Wallace & Gromit, et les aficionados des personnages de Nick PARK et Peter LORD ne sauraient décemment bouder ces nouveaux venus. Ajoutez à cela une technique stop-motion très aboutie (pour rappel, ce procédé filme image par image des marionnettes, modifiées entre chaque prise. Modelées à partir d'une armature de fer, ces marionnettes sont recouvertes de molleton puis d'habits afin de donner une apparence plausible), avec des mouvements ultra-fluides et des expressions faciales réalistes -dans la limite où elles sont supposées l'être !-, et voilà en effet une compilation à rugir de plaisir… Gersende Bollut
Les sept courts-métrages -
Au petit matin (1996) -5' -
Le bébé oiseau (1998) -6'30 -
Des trous dans la maison (1999) -6'30 -
Bonjour les sauvages (1999) -6'30 -
Le voleur (1999) -6'30 -
La tête à l'envers (2000) -6' -
Le studio de cinéma (1998) -6' Fiche d'identité -
Origine : Lettonie - Couleurs - 42 min. |
"Les autochtones de ces Animaux fous, fous, fous sont les dignes héritiers de Wallace & Gromit, et les aficionados des personnages de Nick PARK et Peter LORD ne sauraient décemment bouder ces nouveaux venus" |
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