Conan,
le fils du futur
Réalisée
en 1978 pour le compte de la télévision japonaise et arrivée en France
en 1988, il est je suppose inutile de vous présenter le créateur de
Conan, le fils du futur : j'ai nommé le génial Hayao MIYAZAKI (Laputa,
Totoro, Princesse Mononoké…). Cependant, il n'est peut-être pas inutile
de vous rafraîchir la mémoire sur cette passionnante série...
Conan, un jeune garçon intrépide
à la force incroyable vit seul, sur l'Ile perdue, avec son grand-père.
Nous sommes au 25ème siècle, aux lendemains d'une troisième guerre mondiale,
et depuis des années toute civilisation a disparue, Conan ne connaissant
pas d'autre humain que son vénérable ancêtre… jusqu'à ce jour où il
trouve, échouée sur la plage, une petite fille prénommée Lana. L'on
apprendra par la suite qu'elle est la petite-fille d'un professeur (Raoh),
convoité par la terrible ville d'Industria pour les secrets, concernant
une énergie inépuisable, qu'il détiendrait… De par son lien de parenté,
ladite Lana est donc aussi convoitée. Conan et Lana devront donc déjouer
mille pièges et embuscades de la part des gardes d'Industria -et notamment
de la redoutable Monsry-, afin de pouvoir vivre en paix sur Edenia,
une île paradisiaque (son nom l'indique clairement). Entre-temps, ils
se feront même un ami à l'allure sauvage et d'apparence fruste, un certain
Gimsy -le principal élément comique de la série.
Sans dévoiler tous les aboutissants
de la série, car tel n'est pas le propos de ce dossier, nous tenions
avant toute chose à en présenter les bases, à commencer par cette présentation
succincte des protagonistes. Vous comprendez ainsi que, pour une série
TV d'à peine 26 épisodes, la trame scénaristique est des plus riches,
et pour autant on a le temps de découvrir la psychologie des différents
personnages.
Pour une série de 78, Conan, le
fils du futur a de plus admirablement bien vieilli, et certains épisodes
sont de véritables bijoux au niveau technique (effets visuels saisissants,
montage alerte qui tient en haleine le spectateur…). Une vraie réussite
à mettre sur le compte d'un certain Hayao...
LES DEBUTS DE MIYAZAKI
Si Conan, le fils du futur bénéficie
d'un casting prestigieux dans sa réalisation (Yasuo OHTSUKA au character
design ou Nizô YAMAMOTO aux décors), la série fut sous l'entière responsabilité
de MIYAZAKI, le cinéaste d'animation nippon le plus célèbre (et célébré)
désormais, avec des longs métrage tels que Porco Rosso, Mon voisin Totoro
ou Princesse Mononoké, véritables films à part entière qui ont rallié
tous les suffrages, en réconciliant critique et public. Mais, déjà en
son temps, le succès de Conan fut considérable. Si en France l'effet
fut éclipsé par le phénomène Goldorak, au Japon, l'année 78 fut celle
de la consécration de cette série aux atouts multiples et divers (réalisation
soignée, héros charismatique, traitements thématiques intéressants et
humour décalé). Triomphe un peu partout dans le monde, et notamment
chez nos voisins portugais, Conan le fils du futur est rétrospectivement
l'oeuvre la plus attachante et personnelle du cinéaste, preuve éclatante
d'un talent qui ne demandait plus qu'à être exploité au cinéma. La suite,
on la connaît... jusqu'au tout récent Voyage de Chihiro !
Les thèmes chers au cinéaste d'animation
sont alors déjà clairement présents, la défense de la nature (et non
de l'écologie, MIYAZAKI n'étant pas politisé) et les amitiés pures et
durables étant prônées. L'innocence propre à l'enfance permet au réalisateur
de montrer la pureté de son jugement face à la cruauté d'un monde livré
à lui-même. Cet état ne reste fort heureusement pas stationnaire, et
de gentiment béat, Conan passe ainsi par moult épreuves qui l'endurciront,
afin de devenir un petit homme téméraire qui, en perdant sa naïveté,
conserve une acuité rare sur le monde qui l'entoure : préserver la planète
coûte que coûte et éviter les injustices (quelles qu'elles soient) est
sa seule priorité. Pas d'armes, pas de bombes nucléaires ou de course
à la domination, seulement le plaisir simple de goûter aux joies de
la nature, de la Vie dans ce qu'elle a de plus minimaliste. Un retour
aux sources... "Faites la paix, pas la guerre". Si le discours paraît
simpliste et grandement utopiste, la série arrive à prouver qu'une telle
situation éviterait bien des contrariétés (doux euphémisme).

Sur le plan technique, nous le
disions plus haut, c'est irréprochable. Si les deux-trois premiers épisodes
manquent un peu de rythme, très vite tout s'emballe, et NOUS emballe.
Trépidante dans le sens littéral, la série est alors véritablement prenante,
et le processus d'identification aux héros est inévitable. Conan représente
notre part de courage (ou le fantasme qui nous habite tous d'être héroïque,
tout en ayant l'humilité de ne pas le reconnaître par la suite), Lana
peut symboliser notre peur face aux dangers qui guettent -parenthèse
à part, sa voix quelque peu mièvre et ses régulières pleurnicheries
agacent quand même-, quant à Gimsy, il est l'incarnation vivante
de la personne qui se fout de tout, se rit du danger tout en étant réaliste
face à son propre destin. Véritable trublion à l'accent délicieusement
zozoteur, Gimsy, avec son caractère sauvage et ses manières peu orthodoxes,
achève, avec Conan et Lana, de former le trio-clef de la série, la clef
de voûte d'une longue aventure, menée tambour battant entre Edenia et
Industria, pour le meilleur et pour le pire.
Les seconds rôles ne sont pas
non plus négligés, entre Lepka, qui campe un méchant au sadisme révoltant,
Monsry, pas toujours du côté où on l'attend, et le capitaine Dice, le
bon bougre opportuniste mais sans mauvais fond, qui revient de manière
récurrente et totalement fortuite, à la manière des pirates dans l'univers
d'Astérix... Tout ce petit monde est très attachant, et le dénouement
de la série nous oblige à des ruptures déchirantes, obligés que nous
sommes de respecter un (forcément brutal) retour au réel. A la manière
d'une série obligatoirement bouclée un jour ou l'autre, toutes les bonnes
choses ont une fin...
DISPONIBLE EN DVD
Chaudement recommandée, vous l'aurez
compris, la série intégrale est disponible dans toutes les bonnes boutiques
de France et de Navarre, tenant sur 5 galettes numériques (ou en 9 volumes
VHS, au choix), et valant largement l'investissement, même si la version
originale est totalement absente -hormis le générique, optionnel. Le
doublage français a d'ailleurs été refait à l'occasion de cette édition
vidéo, et les voix sont excellemment bien appropriées aux différents
protagonistes (avec une mention à Patrick ETCHEVERRY, impayable dans
le rôle du moussaillon du capitaine Dice !). Côté bonus rien de vraiment
très original, entre des images tirées des épisodes réparties par thèmes
(les personnages, les lieux, les moments forts…), et des filmographies
basiques, avec celles du staff complet pour chaque épisode. Seul élément
notable à souligner : la présence, sur le premier volume, d'un petit
making of sur ce fameux nouveau doublage. Instructif et surtout bien
mené.
Mais la série justifie de toutes
façons à elle seule l'achat de ces 5 DVDs, qui trouveront assurément
une place de choix dans votre DVDthèque. Incontournable pour tout amateur
du travail de MIYAZAKI.
Gersende Bollut
Fiche technique
- Titre original : Mirai shônen Conan.
- Origine : Japon - Couleurs - 8 h 40 (26
épisodes).
- Date d'arrivée en France : septembre
1988 (sur FR3).
- Production : Nippon Animation.
- Réalisateur : Hayao MIYAZAKI.
- Scénario : Kenshô NAKANO et Sôji YOSHIKAWA,
d'après l'oeuvre d'Alexander KEY.
- Doublage VO : Noriko OHARA, Mieko SHINOZAWA,
Masato YAMAUCHI, Kazuyo AOKI, Takumi KAMIYAMA...
- Musique : Shinichirô IKEBE.
- Sortie DVD : 12 octobre 2000 (vol.1)
/ 20 avril 2001 (vol.5).
- Lien Internet : http://perso.wanadoo.fr/idp
|
|
|
|
"La
série s'inscrit dans cette lignée de grands classiques du dessin animé
japonais, qui prouvent qu'on peut faire des séries intelligentes, distrayantes
et de qualité"
Rui Pascoal
"Les
thèmes chers à Miyazaki sont déjà clairement présents, la défense de
la nature et les amitiés pures et durables étant prônées"
|