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Excalibur, l'épée magique


Hautement mésestimé, Excalibur, l'épée magique est au demeurant une oeuvre très sympathique. Il s'agit "seulement" de faire abstraction des chansons totalement insipides et sans inspiration, et de se focaliser sur l'histoire, brillamment menée, et sur l'ambiance, d'une audace rarement vue dans une production animée de cette envergure.

La trame s'inspire de la légende d'Excalibur, épée magique des fameux chevaliers de la Table ronde, qui confère à quiconque la détient force et puissance inégalées. Ainsi, lorsque le vil sir Ruber et son acolyte Griffin s'en emparent (de façon peu orthodoxe), la téméraire Kayley, qui rêve d'appartenir à la noble confrérie sus-citée, s'embarque sans hésiter dans une longue et dangereuse quête pour retrouver l'épée tant convoitée, et ainsi sauver le royaume de Camelot. Garrett, un jeune ermite aveugle réfugié au coeur de la forêt interdite, devient par hasard son fidèle allié, suivi du peu ordinaire dragon bicephale, nommé Devon & Cornouailles...

Il convient impérativement de considérer cette oeuvre, car elle ne démérite absolument pas. Côté technique, signalons une très bonne intégration des techniques 2D et 3D (à l'exception des séquences finales avec l'ogre, pourtant impressionnant si on l'isole). L'animation générale est tout à fait honorable et n'a pas à pâlir face aux plus récentes productions en terme d'animation traditionnelle.

Mais surtout, cet Excalibur étonne, surprend, voire dérange, fait rarissime dans l'histoire des films d'animation yankees ! Les méchants sont vraiment redoutables, et, menés par l'impressionnant Rubor, ils font instantanément penser aux ennemis du Mulan de Disney. C'est vous dire le degré de qualité du film, quoiqu'aient pu en dire les critiques !

Les points communs avec d'autres grandes oeuvres animées ne s'arrêtent pas là : le graphisme de ces méchants rappelle fortement le style d'un Don BLUTH, et tout le bestiaire imaginaire développé (dragons, chimères et griffon -vraiment effrayant) renvoie au sombre Taram et le Chaudron Magique. Rien que ça ! Car, outre le graphisme général, la violence est d'une crudité rarement égalée : les combats déchaînés forcent l'admiration, et les cadavres pleuvent de part et d'autre. Un OVNI dans la production animée US de cette dernière décennie, vous dis-je.

Cela devrait déjà largement vous convaincre de visionner au plus vite ce long métrage très recommandable. Pourtant, ça n'est pas tout : les références cinéphiliques affluent, et pas n'importe lesquelles (Superman, Taxi Driver, Apollo 13, les cartoons de Tex Avery...). De plus, très bien intégrés, ces clins d'oeil côtoient un humour des plus caustique, avec des répliques franchement drôles par moments -qui ne jurent nullement avec l'ambiance crépusculaire que nous évoquions à l'instant. A l'image de cette chanson du dragon bicéphale, totalement azimutée : "Si je ne t'avais pas" (scoop : on peut donc parler de plagiat pour Monstres & Cie !).

Enfin, last but not least, la rareté des thèmes abordés achève de rendre ce long métrage incontournable. Des sujets aussi sensibles que la perte d'un père ou l'humiliation que l'on peut subir vis-à-vis de la société sont ainsi traités avec une justesse confondante, sans compter que l'un des protagonistes principaux est... aveugle ! Cette cécité ne l'empêchant bien évidemment pas d'être brave. Reste que Frames attend vos réactions : quel autre film américain, dans ces dix dernières années, aborde aussi ouvertement des thèmes bien souvent tabous, dans une société aseptisée et politiquement correcte ? [Euh... Tu connais le cinéma indépendant ? - ND Pierre, rédac chef]

Je dois d'ailleurs l'avouer : ayant eu vent des critiques négatives quant à cet Excalibur -l'épée magique, je m'attendais à un dénouement bêta. Tout du moins heureux, voire totalement illogique (genre l'aveugle qui retrouve la vue, et embrasse l'héroïne). Mon incrédulité devant la fin au bord du désespoir -seule l'épée arrive à bon port mais ça, on s'en serait douté- n'a d'égale que le plaisir procuré par ce long métrage.

Reste qu'il faut savoir fermer les yeux (ou plutôt les oreilles) sur l'indigence des chansons, horripilantes. Une phrase de Garrett lancée à Devon & Cornouailles trouve ainsi une étrange résonnance... "Vous pouvez nous suivre, mais défense de chanter !". Mise en abîme ultime...

Foi d'anime-maniaque, cela faisait perpète qu'un film d'animation (américain, de surcroît) n'avait pas autant foutu les chocottes [Tu parles des chansons là ? - ND Pierre]

Gersende Bollut



Fiche d'identité


- Titre original : Quest for Camelot.
- Origine : Etats-Unis - Couleurs - 1 h 25 min.
- Date de sortie France : 14 octobre 1998.
- Production : Dalisa COHEN / Warner Bros.
- Réalisateur : Frederik Du CHAU.
- Scénario : Kirk De MICCO, William SCHIFRIN, Jacqueline FEATHER et David SEIDLER.
- Doublage VO : Jessalyn GILSIG, Cary ELWES, Gary OLDMAN, Don RICKLES, Eric IDLE, Jane SEYMOUR, Pierce BROSNAN, John GIELGUD...
- Musique : Patrick DOYLE.
- Box-office France : 383.127 entrées.
- Sortie DVD : 29 septembre 1999.
- Lien Internet : http://www.quest4camelot.com/main.html

 

"Aucun autre film américain, dans ces dix dernières années, n'aborde aussi ouvertement des thèmes bien souvent tabous, dans une société aseptisée et politiquement correcte"