Sommaire

Le Néoréalisme italien



PRÉAMBULE

Nous poursuivons des études en troisième année à l’école des Mines de Paris. Dans le cadre de notre enseignement, nous avons l'occasion de réaliser un projet personnel innovant. Appréciant depuis peu le néoréalisme italien et ayant constaté la difficulté de trouver des critiques journalistiques de ces films, nous avons décidé, tout en respectant les droits d'auteurs les plus élémentaires de réaliser un recueil de critiques de
film de ce mouvement. Ces critiques sont surtout remarquables par le style qui est souvent très recherché. L'analyse des films qui y est faite est une invitation à visionner ces derniers et à découvrir de manière plus approfondie ce mouvement. Nous tenons ici à préciser que les droits de
reproduction de ces critiques nous ont été exceptionnellement donnés par les services du Figaro, de l’Humanité et du Canard Enchaîné. Ainsi toute
reproduction et diffusion des critiques de ce présent recueil son soumises aux lois concernant la propriété intellectuelle et peuvent donc être passibles de poursuites légales.

Charles Blanchard et Adrien Charpentier


PRÉSENTATION DU MOUVEMENT

Le néoréalisme italien est un mouvement cinématographique qui s'étend sur une petite dizaine d'années (1945-1953). Bien qu'il soit difficile de le
déterminer de manière précise, le point de départ en est le film Rome Ville Ouverte de Roberto ROSSELLINI sorti en 1945.

Le néoréalisme est né à la suite d’un moment historique exceptionnel. Après vingt années d'oppression et de mensonges, le fascisme mussolinien
s'effondre dans les horreurs, les détresses, les humiliations de la guerre. Ce qui caractérise principalement tous les films de ce mouvement, c'est un retour au réel, au monde réel, aux hommes et aux drames réels. En effet, sous la dictature fasciste puis sous l'occupation allemande, le cinéma italien fut soumis à une rude censure et fut de ce fait coupé des réalités sociales et politiques. Concrètement, ce retour au réel se traduit par un
tournage principalement en extérieur avec des acteurs non professionnels qui parlent parfois des dialectes (comme les pêcheurs siciliens de la terre tremble). Il impose aussi une certaine retenue, une certaine pudeur face aux sentiments et aux émotions que l'on montre et il évite de ce fait tout élan mélodramatique. Ce retour au réel permet au cinéaste de se faire l'écho des interrogations de la société italienne et de pratiquer un examen de conscience de cette société meurtrie par la guerre et par le fascisme.

Comme le montre bien Barthelemy Amengual dans son introduction au néoréalisme parue dans le numéro de CinémAction consacré à ce mouvement. Cet examen de conscience s'accompagne d'une prise de position face au réel que l'on montre. Cette prise de position s'est faite selon trois tendances principales :
- Chrétienne (ROSSELLINI, De SICA, FELLINI)
- Marxiste (De SANTIS, VISCONTI)
- Agnostique (BLASETTI, ZAMPA)

L'intention des cinéastes néoréalistes était de faire des films utiles, de changer la réalité en la transposant de manière très précise à l'écran. Il est à noter que les films néoréalistes n'étaient pas majoritaires dans la production italienne de films de l'époque et bien que souvent chaleureusement reçu par les critiques, ils n'eurent que très rarement le succès populaire espéré. Pour conclure, bien que ce mouvement fut très bref et bien qu'il ne compte qu'une cinquantaine de films à son actif, il fut très important pour le cinéma italien d'après guerre et lança de nombreux réalisateurs majeurs de la seconde moitié du vingtième siècle et servi de modèle et d'inspiration à de nombreux autres. Cinquante ans après la fin de ce mouvement, la démarche réaliste reste encore d'actualité. En effet parmi les nombreux mouvements qu'il a inspiré nous pouvons citer le cinéma social britannique représenté par des réalisateurs comme Ken LOACH ou Mike LEIGH.


OSSESSIONE
Les amants diaboliques

Premier film de Luchino VISCONTI, il reprend le thème célèbre au cinéma d'un roman de James CAIN : le Facteur Sonne Toujours Deux Fois. Le film nous raconte l'histoire d’une femme et de son amant qui s'entendent pour éliminer le mari de cette dernière. Ce film fut considéré comme l'acte de naissance du néoréalisme italien (bien que l'origine du mouvement lui soit
contestée par le film, pourtant postérieur, Allemagne Année Zéro). D'ailleurs, la légende dit que c'est en visionnant les rushes du tournage qu'un des monteurs inventa le terme "néoréalisme". Tourné en pleine période fasciste, il subit les affres de la censure et souleva à l'époque un énorme tollé. En effet, c’est la première fois que l'on montrait à l'écran la dure réalité des pauvres en Italie. Ce film fut interdit dans de nombreuses salles et ce n'est qu'après la guerre que l'on pu redécouvrir ce film qui est considéré comme l'un des plus importants de l'histoire du cinéma. De plus, il laisse déjà apercevoir tout le talent du jeune VISCONTI.

Revoir Ossessione -Naissance d’un grand cinéaste : VISCONTI
Critique de l'Humanité, 14 janvier 1959

On éprouve toujours un pincement de cœur à la redécouverte d'un chef-d'œuvre. Ossessione, le premier film de Luchino VISCONTI, tourné en 1942 en pleine Italie fasciste, est de ces films qui procurent ce genre de réaction-là. Par la fenêtre qu'il ouvre sur son époque, aussi bien que sur la personnalité d'un auteur appelé à devenir l'un des plus grands qui, pour son
coup d'essai, se permit de hisser une banale histoire psychologico-policière au rang d'une véritable tragédie. Chacun sait qu'il s'agit d'un roman de James CAIN, Le facteur sonne toujours deux fois, paru à la veille de la guerre, dont on connaît déjà trois autres adaptations. Du Dernier Tournant de Pierre CHENAL en 1939, à celle de Bob RAFELSON, la dernière en date (après celle de Tay GARNETT) présentée en France l'année passée.
C'est Jean RENOIR qui avait fait cadeau du sujet à VISCONTI, peu avant le
retour de ce dernier en Italie, au terme de leur collaboration. "Prends cela,
lis le, peut-être que ça t'intéressera
", lui avait-il dit. "Ce fut précisément mon séjour en France et l'approche d'un homme comme RENOIR qui m'ouvrirent les yeux sur beaucoup de choses, déclara plus tard VISCONTI. Cela me fit comprendre que le cinéma pouvait être le moyen de s'approcher de certaines vérités, dont nous étions très loin, surtout en Italie". En effet. Si les premières fissures qui allaient conduire, en s'élargissant, à l'effondrement du fascisme, commençaient à se faire jour, le cinéma italien, avait que très peu varié. On en était toujours aux "téléphones blancs", aux aventures, sentimentales et autres, sans rapport aucun avec la réalité concrète de la vie. Tout se passait dans les films à l'intérieur d'un monde idyllique, dénué de contradictions, loin des soucis quotidiens.
Dans ce calme plat, Ossessione produisit l'effet d’un coup de tonnerre. Car non seulement on y voyait apparaître un couple d'amants meurtriers du mari (ce qui ne pouvait que choquer la censure religieuse) mais, chose plus
grave encore, on y découvrit le vrai visage de la misère et de la médiocrité, du chômage, de l'appât de l'argent, en un mot la critique la plus radicale qui soit de l'idéologie du régime.
VISCONTI dû faire face à une levée de boucliers, aidé en cela par un groupe de jeunes critiques réunis autour de la revue Cinéma, dont le travail, se réclamant, de façon voilée, du 'vérisme' de VERGA (le romancier italien le plus important du siècle dernier), avait créé les conditions de la réalisation du film. Une très grande œuvre était née, qui ouvrait toute grande la perspective à ce que devait être, la Libération venue, le néoréalisme, l'école cinématographique la plus fertile d'après-guerre. Il faut revoir, aujourd'hui, Ossessione.
François Maurin

Les amants diaboliques
Critique du Figaro, 15 octobre 1959

Ce film de Luchino VISCONTI tourné en 1942, suit à quelques détails près (et parfois avec d'assez importantes variantes) la ligne générale du roman de James Mac CAIN, Le Facteur sonne toujours deux fois. On a vu jadis sur le même thème un film américain, et ce n'est pas le moindre mérite de l'œuvre de VISCONTI que de nous faire comparer le style de deux écoles du cinéma à propos d’un scénario sensiblement identique.
Ici, c'est le réalisme illustré par les metteurs en scène d'au-delà des
Alpes. Un réalisme qui rejoint même ces premiers films où le cinéma italien
donnait de la vie populaire une image fidèle. Les ruelles de Ferrare, les
enfants traînant le long des murs, les ménagères bavardant. On dirait un
reportage tourné par un chasseur d'actualités filmées. La reconstitution de
l'accident-crime, les beuveries villageoises, le dimanche avec les accordéons, tout cela traduit le misérabilisme du "fait divers".
Défauts. De graves longueurs et une interprétation trop appuyée de Clara CALAMAI.
P. Ms

Ossessione -La bride sur le couple
Critique du Canard Enchaîné, n°3225, 18 août 1982

La femme et l'amant suppriment le mari en fabriquant un faux accident d'auto. Ils échappent à la justice mais ils sont ensuite victimes d’un
vrai accident d'auto. On a reconnu le thème du roman de James CAIN Le facteur sonne toujours deux fois. Thème illustré par plusieurs cinéastes (...) Luchino VISCONTI s'en inspirant, lui aussi, en 1942. MUSSOLINI se souciant du peuple comme de sa première chemise noire, c'était l'époque où triomphaient, sur les écrans italiens, des comédies bourgeoisement lénifiantes.
Luchino VISCONTI situa son film dans les milieux populaires de la vallée du Pô. Et, tout en suivant librement la trame du livre, il évoqua une dure réalité comme le chômage et la misère. Scandale dans l’Italie fasciste. Le spectacle ne fut autorisé que mutilé. Censure d’autant plus qu’absurde qu'Ossessione rétablit, depuis lors, dans son intégralité, marquait la naissance du néoréalisme italien. La plupart des manuels spécialisés ont relaté ces avatars. Ce qu'on peut ajouter, c'est que, quarante ans après le tournage, le film de Luchino VISCONTI, fiévreusement joué par Massimo GIROTTI et Clara CALAMAI, reste une œuvre singulière et prenante. Les programmes d’été comportant quelques trous, voilà une bonne reprise.
Jean-Paul Grousset

Date de sortie : 1943 / Noir & blanc / 1 h 52 mn.
Réalisateur : Luchino VISCONTI.
Scénario : Luchino VISCONTI, A PIETRANGELI et G De SANTIS, d'après James CAIN.
Principaux acteurs : Massimo GINOTTI, Clara CALAMAI, Elio MARCUZZO...


ROME VILLE OUVERTE

Film-phare du néoréalisme, il rend hommage à la résistance et plus généralement à tous ceux qui ont subi les affres de l'occupation. Tourné avec des moyens de fortune, des interprètes non-professionnels mêlés à des acteurs confirmés, ce film suit les préceptes du néoréalisme. Il permit aussi à ROSSELLINI de se hisser au premier rang des cinéastes de sa génération. Ce film fut très bien accueilli par la critique qui voyait en lui la
renaissance du cinéma italien. De plus, il rendait ses lettres de noblesse à la résistance italienne, ce qui était un point très fort pour cette population traumatisée après la guerre. Cependant une partie de l'Italie fut choquée par les propos du film car il lui renvoyait l'image de son rôle et de son attitude ambiguë pendant la guerre. Ce film marqua l'éclosion de Roberto ROSSELLINI comme réalisateur et la révélation d'une grande actrice : Anna MAGNANI. Ce film reçut la Palme d'Or du festival de Cannes en 1946.

Rome ville ouverte -Ou la lumière nous vient d'Italie
Critique du Canard Enchaîné, 19 décembre 1946

On savait bien que L'Espoir de MALRAUX ne serait pas sans lendemain. Mais on commençait tout de même à trouver le temps long. L'exemple donné par MALRAUX n'aura pas été vain. Voici, en effet, que nous arrivent d'Italie deux films extraordinaires, deux films bouleversants et qui nous donnent une drôle de leçon : Rome ville ouverte et Païsa de ROSSELLINI. Je ne vous parlerai aujourd'hui que de Rome ville ouverte puisque Païsa, le plus remarquable à mon sens, n'a pas encore été projeté devant le public.
Tout de suite, je vous le dis : j'ai eu le souffle coupé par ces deux morceaux de cinéma pur.
M. ROSSELLINI a tourné son film à la sauvette, sans aucun moyen. Il a dû vendre ses meubles pour le terminer. Tous ses acteurs (à l'exception de
FABRIZI –un diseur de monologue qui se montre l'égal des plus grands– et
d'une petite chanteuse de music hall : Anna MAGNANI, qui peut être tenue comme l'une des plus saisissantes actrices du nouveau monde et de l'ancien), tous ses acteurs ont été pris à tout hasard dans la foule. Et l'on ne se trouve plus ici devant ces vedettes exigeantes et totalitaires, mais devant des types épatants qui tournent dans l'enthousiasme et qui ont le feu sacré ! Ils se donnent complètement, ils se fichent de leur profil, ils ne songent ni à l'opérateur ni à leur standing personnel. Ah ! Oui, voilà du cinéma, voilà de l'art, voilà du génie !
Et c'est une fois de plus que l'argent corrompt les meilleurs. La pauvreté, c'est tout de même la jeunesse, la jeunesse qui se risque, la jeunesse qui ose, la jeunesse qui n'a rien perdre, la jeunesse inconsciente et téméraire.
M. ROSSELLINI nous conte un épisode de la résistance italienne avec Gestapo, torture, attentats, exécution etc.
Les gens vous disent :
- Les films sur la résistance, on en a par dessus la tête…
… Mais ils seront bien obligés d'aller voir Rome ville ouverte. Ils ne pourront pas faire autrement. S'ils ne voyaient pas ce film, ils ne pourraient plus parler de cinéma. Rome ville ouverte est un film essentiel. Un film-clef. Un film historique. Parce qu'il ne s'embarrasse pas de préjugés, parce qu'il n’a pas pris d'habitudes, parce qu'il est un homme libre, M. ROSSELLINI vient de rendre au cinéma un grand service. Il a rappelé tout le monde à l'ordre :
- Qu'avez-vous tous à courir après les vedettes, à faire de la photographie léchée, à fabriquer des scénarios en observant des lois imbéciles édictées par des crétins, à vous figer dans des moules de série… Vous ne voyez pas que vous vivez de poncifs et que vous crevez étouffés… Il y a trente ans que vous êtes enfermés dans des studios…Vous n'avez donc pas envie d'aller voir ce qui se passe dehors. Vous avez perdu de vue la réalité.
Le cinéma grâce à ROSSELLINI retourne à ses sources. Son film est une succession de miracles. Il a enregistré le son après coup, car il ne pouvait pas s'offrir le luxe d'un camion sonore. Et l'on s'en moque complètement. L'intérêt du film est ailleurs.
Il est dans cette vérité de tous les instants, surprise dans le simple appareil d'une beauté qu'on vient d'arracher à la vie. On n'oubliera pas de sitôt cette maison ouvrière avec ses escaliers pathétiques, ses drames si simples, si dépouillés, si familiers, pourrait-on dire. On n’oubliera pas la nuit de l'interrogatoire avec la salle de torture d'un côté, la salle de jeu de l'autre, et ce bureau blafard entre les deux, ce cocktail de sang et d'alcool et cette odeur de cigare humide… On n'oubliera pas la perquisition et cette foule sourdement révoltée. On n'assiste pas à un film. On est mêlé à une action, on y participe… Chaque fois qu'un personnage inconnu s'introduit chez ces résistants on a envie de crier : "Attention, c'est un espion !" et on a l'impression qu'on va être, d'un instant à l'autre, arraché de son fauteuil et jeté en prison !
M. ROSSELLINI, avec son film, a bien servi la cause de la paix. Il nous a restitué le vrai visage du peuple italien, si cruellement déformé par les politiciens, les mauvais acteurs et les ténors. L'Italie, pour nous c'était les manifestations empathiques de d'Annunzio, les spectaculaires redondances de Mussolini, les gabiriades, les scipionnades à la Maciste quatre deux de Carmine Gallone ou de Genina, c'était l'orgie romaine de Quo vadis et Rodomont tiré à un million d'exemplaires. Il nous faut réviser toutes nos fausses conceptions. Le film de ROSSELLINI, c’est un verre d'eau fraîche qu'on jette à la figure d'un ivrogne pour le dégriser.
- Il faut revenir à soi, nous regarder en face, et nous juger sans idée préconçue… Nous avons des défauts, irritants sans doute, mais voici nos qualités… Fais la part des choses et juge-nous sur des évidences.
- Oui le cinéma est un moyen de faire connaissance.
Il a beaucoup menti, beaucoup triché. Avec M. ROSSELLINI, il se met à table et nous dit la vérité.

Date de sortie : 1945 / Noir & blanc / 1 h 40 mn.
Réalisateur : Roberto ROSSELLINI.
Scénario : Roberto ROSSELLINI,
Sergio AMIDEI et Federico FELLINI.
Principaux acteurs : Anna MAGNANI, Marcello PAGLIERO, Francesco GRANDJACQUET...


ALLEMAGNE ANN
É
E ZÉRO

Dans cet autre film de ROSSELLINI, le réalisateur s'intéresse à la vie d'une famille allemande dans le Berlin presque entièrement détruit de l'après-guerre. Il est intéressant de noter que c'est un des rares films néoréalistes n'ayant pas pour cadre l'Italie et qu'il a été tourné en allemand. Bien que tourné en utilisant les méthodes qui firent le succès de Rome Ville Ouverte, il connut un accueil beaucoup moins chaleureux de la part de la critique. En effet, certains lui reprochèrent ses accents beaucoup trop mélodramatiques et trop éloignés de la réalité. Il semblait donc que ROSSELLINI avait poussé un peu trop loin sa méthode. Toutefois, avec le temps, la critique s'est adoucie et on reconnaît cette œuvre comme un témoignage poignant sur l'Allemagne d'après-guerre.

Les Romains ont vu "Berlin an zéro"
Critique du Figaro, 14 avril 1948

Le nouveau film de ROSSELLINI Berlin an zéro, qui vient d'être présenté à Rome, évoque la vie d'une famille allemande au lendemain du désastre. D'abord le cadre : une ville en ruine, des maisons décapitées, un panorama de cailloux sans âme. Ensuite, le "milieu" : plusieurs ménages ont refuge dans l'un des immeubles encore habitable quoique délabré. Le drame : c'est évidemment la misère, la faim, le problème toujours posé, jamais résolu. Le père très malade ne peut aider les siens. Le fils aîné, ex-combattant nazi, qui craint l'épuration se cache et n'a pas de carte de ravitaillement. La sœur qui engage avec les américains, au dancing, des relations utilitaires. Enfin le petit frère Edmund. C'est la figure centrale de l'action. Edmund cherche courageusement à rapporter à la famille de quoi l'aider à vivre. Puis il cède aux mauvais conseils et la tragédie commence. Il ne semble pas ici que le metteur en scène ait été servi par les mêmes qualités d'inspiration que dans Rome Ville Ouverte et Païsa. On reproche au film de s'apparenter moins à un drame qu'à un mélo assez primaire. Bref, le film a généralement déçu.
M.M.

Un cinéma à l'état sauvage
Critique du Figaro littéraire, 12 février 1949

Les deux films marquants de la semaine ont des enfants pour héros principaux. Mais des enfants arrachés par la guerre et ses suites à leurs conditions de vie normales, le corps et l'âme répartis à vif et paradoxalement dénaturés par ce retour à l'état de nature. La première de ces œuvres est Allemagne Année zéro qui fut tournée dans les ruines de Berlin par Roberto ROSSELLINI. L'autre, Quelque Part En Europe, signée Geza RADVANYI, nous arrive entre deux oppressions de Hongrie, comme un bref et pathétique appel vers une liberté déjà reperdue. Tout autant que leurs thèmes voisins rapprochent ces films la façon dont ils ont été réalisés. Au grand scandale des pontifes de la profession, Roberto ROSSELLINI déclarait à Roger REGENT, lors de son dernier passage à Paris, qu'il se refusait à savoir comment son film finirait le jour où il commençait de le tourner. Mais il faut citer, d'après L'Ecran Français, ces étonnantes paroles : "Je suis incapable de travailler avec un corset. Un scénario rigoureux qu'on suit pas à pas, un studio avec tout son équipement, toute cette préméditation de décors et de lumière, cela constitue pour moi ce qu’il y a de plus odieux... C'est parce que je n'ai pas peur de la vérité et que j'ai la curiosité de l'être humain que je fais figure de grand réaliste ! Je le suis, oui, si le réalisme c'est abandonner l'individu devant l'appareil et le laisser construire lui même son histoire ! Dès le premier jour de tournage, je m'installe derrière mes personnes et je laisse ma caméra leur courir après..." (2 novembre 1948)
A cette insolite prise de position correspond celle de Geza RADVANYI qui
se réclama nommément de ROSSELLINI lorsqu'il s'expliqua devant Jean Pierre VIVET pour les lecteurs de Combat : "Ce sont les nécessités du moment qui m'ont contraint à parcourir la Hongrie avec ma caméra et mes gosses. Je ne pouvais faire autrement. Tous les studios étaient démolis. Mais, en même temps, je sentais bien que ce serait cela, le cinéma de demain. Je n'étais pas le seul. Est ce que les choses ne se sont pas passées de la même façon en Italie avec De SICA, ROSSELLINI et les autres ?" Et de préciser qu'il n'avait pas de scénario pour Quelque Part En Europe : "J'avais chargé mes gosses sur deux camions, nous avons emprunté les routes où ils avaient vécus tant d'heures dramatiques et nous avons en quelque sorte tourné au hasard de leur souvenirs" (29 janvier 1949)
Et certes, il ne faut pas généraliser. Mais ce n'est pas tout à fait par hasard non plus si les meilleures scènes du Journal D'une Femme De Chambre de Jean RENOIR sont celles qu'il dû improviser sur son plateau hollywoodien parce qu'il ne trouvait pas la fin de son film ; si l'on nous affirme que l'étonnant Preston STURGES (...) invente lui aussi, devant la caméra et si Orson WELLES pouvait un jour affirmer à André BAZIN, Jacques BOURGEOIS et moi même que les séquences de La Splendeur des Amberson qui nous semblaient les plus concertées avaient été tournées sans découpage préalable.
Disons tout de suite que la méthode est dangereuse et qu'il ne sera jamais inutile de parer les éventuelles faiblesses de l'inspiration grâce à un scénario minutieusement préparé. Ainsi font René CLAIR et Georges-Henri
CLOUZOT, qui ne travaillent pas sans filet. Le premier parce qu'il ne sépare point ces opérations complémentaires que sont le découpage, le tournage et le montage. Le second pour cette raison qu'il se méfie des chutes possibles de son génie. C'est au surplus une affaire de génie et il n'y a pas de règles. Mais il faut bien reconnaître que la méthode délibérément empirique de ROSSELLINI, si elle le servit au maximum dans Païsa eut avec Allemagne Année zéro des résultats infiniment moins heureux. En revanche, ce qui est manqué dans Quelque Part En Europe c'est la partie de son histoire que Geza RADVANYI avait arrêtée à l'avance et où il introduit un musicien fort conventionnel.
Quels que soient les défauts de Allemagne Année Zéro et Quelque Part En Europe, ils apportent des témoignages d'autant plus bouleversants que nous ne pouvons faire montre à leur égard de ce détachement qui est le notre en présence de faits réels mais à tout jamais révolus. Si la déchéance honteuse de ces enfants, physiquement et moralement égarés quelque part et même un peu partout en Europe, appartient à l'histoire, ce n'est pas seulement, hélas ! à l'Histoire passée... Il existe à l'heure actuelle de nombreux gosses pour se trouver dans cette abandon. Et beaucoup d'autres risquent de venir tôt ou tard grossir le long des ruines de l'Europe leur foule innocente et pourtant condamnée : ce sont peut être les nôtres.
Claude Mauriac

Date de sortie : 1947 / Noir & blanc / 1 h 18 mn.
Réalisateur : Roberto ROSSELLINI.
Scénario : Roberto ROSSELLINI,
Max COLPET et Carlo LIZZANI.
Principaux acteurs : Edmund MOESCHKE, Franz KRUGER, Barbara HINTZ...


LE VOLEUR DE BICYCLETTE

Ce film prend le prétexte d'une anecdote des plus banales (un ouvrier perd sa bicyclette et essaie de la retrouver dans les rues de Rome) pour nous faire découvrir la Rome d'après-guerre. Cette ballade, cette fresque aux accents naturalistes est empreinte de vérité et d'émotion. Le chômeur, voleur de la bicyclette, symbolise un monde dans lequel l'injustice sociale serait abolie. Dès sa sortie, ce film fut unanimement salué comme étant un chef-d'œuvre. A l'heure actuelle, il semble être un des films les plus connus et célèbres du néoréalisme italien. C'est un des films emblématique de ce mouvement (seul Rome Ville Ouverte peut lui contester ce titre). Cette œuvre n'a rien perdu de son actualité et semble même avec le temps avoir gagné en sens et en signification. Voir le dossier complet de Frames.

Le Voleur de Bicyclette
Critique du Canard Enchaîné, 9 novembre 1983

Un colleur d'affiches de Rome désemparé parce qu'on lui a dérobé le vélo indispensable à son travail. Dans l'Italie de 1948, cette histoire -tirée d'un livre de Luigi BARTOLINI- n'intéressait guère le producteur. Aussi le cinéaste Vittorio De SICA et le scénariste Cesare ZAVATINI durent-ils se battre pour imposer leur film. Résultat : un des spectacles les plus marquants du néoréalisme italien. Drame du chômage, de la solitude, de la misère. Mais aussi côté auteurs, œuvre de tendresse et de générosité. Comme quoi les bons sentiments n'empêchent pas de faire du bon cinéma.
J.P. Grousset

Le Voleur de Bicyclette
Critique du Figaro, 16 mai 2003

Si l'on se réfère aux opinions ouvertement exprimées par René CLAIR, Marcel CARNE, BECKER, BRESSON et quelques autres grands metteurs en scène, Le Voleur de Bicyclette a produit une grande impression dans le milieu cinématographique français. Jacques BECKER est allé jusqu'à dire -approximativement -qu'une telle œuvre pourrait bien tracer au septième art la voie de son destin véritable. Nous attendrons pour disserter sur le nouveau film de Vittorio De SICA, que le grand public soit à même d'en juger -échéance d'ailleurs prochaine. Indiquons simplement aujourd'hui quelques-unes des raisons qui nous semblent désigner en effet Le Voleur de Bicyclette comme une œuvre importante.
Le scénario tiendrait en deux lignes sous la rubrique des faits divers. Vittorio De SICA nous apprend que la plus simple et la plus banale anecdote peut receler des valeurs dramatiques inattendues. Ainsi, jadis, un savant démontrait-il que dans un sou dormaient des puissances capables de déplacer une locomotive. Une aventure humaine -parfois drôle, parfois bouleversante- est rendue dans son entière signification avec quelle économie de moyens ! Deux personnages : un ouvrier et son petit garçon. L'intrigue est constituée par des incidents de rue dont nous pourrions tout moment devenir les témoins dans notre quartier.
Aucune scène inutile. Chaque image vient illustrer un de ces malentendus qui font agir si souvent les foules contre l'homme solitaire, au mépris de sa bonne foi. Chaque image vient plaider en faveur d’une plus grande solidarité. René CLAIR a dit : "On pense à L'Opinion Publique, de Charlie CHAPLIN" (on pense aussi au Kid). Encore le drame est-il ici plus convaincant et chose curieuse parce que plus sommaire. Vittorio De SICA veut rester fidèle à la vie jusqu'au bout : le dénouement est volontairement noir. Si l'on y réfléchit il faudrait par un miracle, en effet, pour que les circonstances évoquées, le victime retrouvât sa bicyclette. Vous irez bientôt voir ce film que l'on a pas fini je crois de commenter et dont nous tenons à féliciter chaleureusement l'auteur dès aujourd'hui.
Louis Chauvet

Date de sortie : 1949 / Noir & blanc / 1 h 25 mn.
Réalisateur : Vittorio De SICA.
Scénario : Cesare ZAVATTINI, d'après Luigi BARTOLINI.
Principaux acteurs : Lamberto MAGGIRANI, Enzo STAIOLA, Lianella CARELL, Gino SALTAMERENDA, Vittorio ANTONUCCI...


RIZ AMER

Ce film de Giuseppe De SANTIS raconte une tragédie amoureuse mêlée à une intrigue policière, le tout sur fond de lutte des classes. L'histoire se déroule dans la plaine du Pô, chez les ouvrières chargées de récolter le riz. Le film, profondément enraciné dans le réel, nous décrit le dur labeur des filles travaillant dans les rizières piémontaises. A travers les multiples oppositions entre les ouvrières légales et les ouvrières clandestines, De SANTIS peut exprimer sa vision du monde à tendance marxiste et montrer les difficultés de la réalité de l'Italie d’après-guerre. Ce film reçut un bon accueil, même si l'on fustige parfois les lourdeurs de la réalisation et une intrigue aux accents trop hollywoodiens. Ce film fut surtout remarqué par la composition de la magnifique Silvana MANGANO, qui fut considérée comme une des premières pin up du cinéma d'après-guerre.

Riz Amer
Critique du Figaro, 9 septembre 1949

Voila certainement un film qui ne passera pas inaperçu. L'on en discutera. Déjà l'on en discute. Il présente de lourds défauts. Il porte aussi la marque d'une personnalité sans nul doute exceptionnelle. Riz Amer a été réalisé par un des plus jeunes cinéastes italiens, Giuseppe De SANTIS, auquel nous devons déjà Chasse Tragique. Dès les premières images, on sent la présence d'un metteur en scène capable d'une singulière virtuosité. Près de Vercelli arrivent des centaines de femmes qui, tous les ans, à la même époque, viennent cueillir le riz. Les trains déversent une multitude bruyante et Giuseppe De SANTIS nous promène à travers cette foule anonyme où déjà s'amorcent des intrigues, des drames. C'est une sorte de foire pittoresque, étourdissante. Nous voyons les gens aller et venir, former des courants divers, et pas une minute nous n'avons l'impression d'avoir affaire à des acteurs. Toujours cette magique impression de vérité que savent si bien produire les Italiens. En quelques minutes, Giuseppe De SANTIS gagne sa partie de metteur en scène.
L'intrigue évolue tandis que se poursuit méthodiquement la peinture d'atmosphère. Cette peinture est jusqu'au bout captivante. Le narrateur sans doute bénéficie d'éléments dont l'exotisme soulève aisément l'attention. Mais il les exploite avec un art indiscutable. Il en tire admirablement parti. Dans la vaste plaine submergée, les femmes travaillent ayant de l'eau jusqu'aux genoux. Elles avancent patiemment, en ligne. La tradition veut qu'elles échangent les nouvelles d'un groupe à l'autre par des chansons improvisées. Un conflit les oppose-t-il ? C'est le même chant -qui porte leur polémiques, leurs imprécations. Nous sommes vraiment dans un univers aux couleurs inédites et dont une personne étrangère ne pourrait imaginer l'existence.
L'intrigue ? Elle était nécessaire si l'on voulait que le film ne restât pas un simple documentaire. Et d'ailleurs elle n'apparaît pas indésirable à proprement dire. Mais avec l'intrigue, fort brutale et que traversent parfois de beaux accents tragiques, surgit l'inévitable bandito qui s'avise de tout contaminer, interviennent les poncifs du réalisme sordide et se manifestent les outrances non moins habituelles du cinéma italien. L'affaire se termine par un duel à mort, dans le local de la ferme affecté la boucherie, par un véritable bain de sang digne du film hollywoodien le plus violent. Une des jeunes femmes plongera spectaculairement dans le vide après avoir gravi le haut échafaudage qui domine la rizeraie. Notons qu'en cours de route ce réalisme a bifurqué volontiers vers les thèmes scabreux.
En somme, on retrouve ici les mêmes qualités et les mêmes défauts dont témoignait déjà Chasse Tragique. Défauts grossis et qualités qui gagnent en robustesse. On ne sait pas au juste où peuvent conduire ces progrès de l'auteur. Il est toutefois certain que si Giuseppe De SANTIS arrive un jour à démêler son art, il pourra devenir un personnage cinématographique des plus importants. Déjà quelque chose le sauve presque : l'enthousiasme peu banal avec lequel il mène jusqu'au bout chacune de ses entreprises. Il est rare de voir un metteur en scène se donner aussi totalement à son œuvre et montrer un tel courage, même dans l'erreur.
Parmi les interprètes, on remarque l'exceptionnelle beauté de Silva MANGANO qui est, si l'on veut, la Joan RUSSEL italienne. Doris DOWLING, actrice d'origine américaine, réussit une création de celles qui annoncent une intéressante carrière.
Louis Chauvet

Riz Amer
Critique du Canard Enchaîné, 22 juin 1983

Image mémorable de ce film tourné en 1948 par Giuseppe De SANTIS : la sensuelle Silvana MANGANO plongée dans la boue jusqu'aux cuisses. Cette "mondine" -ouvrière agricole temporaire- n'est pas seule. Comme elle, des centaines de femmes, pour un maigre gain, s'acharnent au labeur dans les rizières de la plaine du Pô.
A l'exposé de leur condition s'ajoute un fait divers. Bien qu'il soit joué par Ralf VALLONE et Vittorio GASSMAN, il est passablement mélo. Reste la partie forte du spectacle : un pamphlet contre l'exploitation des humbles. Rien que pour ça, Riz Amer méritait cette reprise, ou plutôt ce repiquage.

Date de sortie : 1948 / Noir & blanc / 1 h 48 mn.
Réalisateur : Giussepe De SANTIS.
Scénario : Carlo LUZZANI et Gianni PUCCINI.
Principaux acteurs : Vittorio GASSMAN, Silvana MANGANO, Doris DOWLING, Raf VALLONE...


SCIUSCIA

Premier film néoréaliste de Vittorio De SICA, qui fut un des principaux animateurs de ce mouvement. En racontant l'errance de deux misérables jeunes garçons cireurs de chaussures, il dresse un portrait réaliste mais critique de l'Italie d'après-guerre (cette caractéristique se retrouve dans de nombreux autres films de De SICA). Comme les autres films de De SICA présentés dans ce dossier, ce scénario fut écrit en collaboration avec Cesare ZAVATTINI qui est considéré comme le théoricien, l'homme le plus impliqué et représentant le mieux le néoréalisme italien. Ce film fut très bien accueilli à sa sortie, mais plus tard, il a souffert de la comparaison avec les autres réalisations de De SICA que sont Umberto D, le Voleur De Bicyclette et Miracle à Milan. Par conséquence, il a perdu un peu de sa notoriété et il est réservé maintenant à un public de cinéphiles avertis.

Sciuscià
Critique de l'Humanité, 3 avril 1957

Le studio 43 reprend à partir d'aujourd’hui, et pour une semaine seulement le grand film de Vittorio De SICA : Sciuscià. Voici comment Calo LIZZANI dans son ouvrage sur Le Cinéma Italien (éditeurs français réunis) parle de ce film qui marque un tournant dans l'œuvre de Vittorio De SICA. "Dans tout le film on sent vibrer, en même temps qu'une note amère et désespérée un frémissement de vitalité, un désir farouche de sérénité et de joie, un appel angoissé à la compréhension humaine. De tout le film se dégage un sentiment de révolte qui s'adresse non seulement à ceux qui en sont les responsables directs, mais à la société elle-même. A travers le problème de l'enfance abandonnée et dévoyée, l'accusation veut porter sur les bases même d’un système de vie, et c'est pourquoi elle se fait ardente et frappe tous ceux qui ne savent pas tirer de nos malheurs l'occasion de faire un examen personnel, la raison d'un renouveau et d'un progrès. L'utilisation abondante des extérieurs, l'emploi de nombreux acteurs non professionnels confèrent ainsi a Sciuscià une liberté de pensée particulière et une innocence qui étonnent surtout les étrangers et qui font crier au chef d'œuvre".

Sciuscià
Critique de l'Humanité, 28 septembre 1984

Premier d'une trilogie phare du néoréalisme italien, Sciuscià sera suivi du très célèbre Voleur de Bicyclette et de Miracle à Milan, films à la double signature : Vittorio De SICA pour la réalisation, mais aussi Cesare ZAVATTINI, scénariste et théoricien. La réédition aujourd'hui de Sciuscià grâce au dynamisme d’un "petit" distributeur se justifie d'autant plus que le film était, commercialement du moins, en voie de perdition. Mais tout autant parce qu'il s'agit de l'une des œuvres les plus sensibles du cinéaste-comédien. Sur le décor, cassé, d'une Italie en ruines, De SICA se montre poète de l'enfance. Sciuscià est le cri, la formule qu'ils espèrent magique avec laquelle les enfants abandonnés de l'après-guerre, devenus cireurs de souliers, tentent d'arrêter le grand et riche soldat américain qui passe. "Shoe Shine" croient-ils dirent. Un cri d'enfant, le cri d'un pays aussi, répercuté à l'infini depuis quarante ans, dont l'écho rebondit encore et maintenant du côté de l'Amérique latine. Un cri sans fin, hélas ! C'est pourquoi nous l'entendons toujours aussi bien.
C.S.

Sciuscià
Critique du Canard Enchaîné, 3 octobre 1984

"Shoe Shine", disaient les Américains voulant faire briller leurs souliers. "Sciuscià", traduisirent les petits cireurs italiens. Situé dans la Rome de l'immédiat après-guerre, le film tourné en 1946 par Vittorio De SICA, d'après un scénario de Cesare ZAVATTINI, relate la mésaventure de deux
de ces gosses. Sur fond de bouleversement historique et de misère sociale, maints déboires jalonnent leur itinéraire de la rue à la prison. Sciuscià n'est pas une œuvre aussi accomplie que le Voleur De Bicyclette ou Umberto D., des mêmes auteurs. Les amateurs de néo-réalisme peuvent néanmoins y trouver chaussure à leur pied.
J.P. Grousset

Date de sortie : 1946 / Noir & blanc / 1 h 30 mn.
Réalisateur : Vittorio De SICA.
Scénario : Cesare ZAVATTINI.
Principaux acteurs : Rinaldo SMERDONI, Franco INTERLENGHI, Annielo MELE, Bruno ORTENSI...


UMBERTO D.

Après avoir décrit la misère des enfants dans Sciuscià et celle des ouvriers dans le Voleur de Bicyclette, De SICA nous raconte dans ce film poignant la misère des personnes âgées. En effet, il s'agit ici de raconter la solitude d’un vieillard isolé, qui n'a plus assez d'argent pour payer son loyer et qui voit en son chien son seul et unique ami et confident. Ce film, tourné juste après le Voleur de Bicyclette reçut un accueil critique des plus mitigés. Certains y virent l'aboutissement, l'accomplissement de la démarche néoréaliste de De SICA. Ce film était pour eux un portrait des plus poignants de la tragédie d'une époque. D'autres regrettèrent l'aspect très sec de ce film, au héros peu attachant et à l'intrigue des plus simples, presque inexistante. Il reste maintenant comme une oeuvre majeure de De SICA et il marque la fin des grands films néoréalistes de cet auteur.

Un savant collabore au vérisme
Critique du Figaro, 11 octobre 1952

Un détail pittoresque à propos du film italien Umberto D. qui vient d'être présenté au profit des classes moyennes. Le rôle principal, celui du vieux retraité condamné à la misère, est interprété par le professeur Carlo BATTISTI, directeur de l'Institut de philologie de l'Université de Florence, membre de plusieurs académies étrangères. Le film terminé, le professeur BATTISTI reprit fort simplement son travail habituel : la rédaction du dictionnaire étymologique italien, dont il s'occupe depuis vingt-cinq ans…

Umberto D.
Critique de l'Humanité, 14 octobre 1952

Umberto D. est le dernier film de la grande trilogie conçue par Cesare ZAVATTINI et Vittorio De SICA pour faire sentir le plus fortement possible aux spectateurs de monde entier la profonde misère de l'Italie d'aujourd’hui. Après Sciuscià : la misère des enfants innocents poussés au vol et au crime par la guerre, l'occupation, le régime stupide des pénitenciers : après le Voleur de bicyclette : la misère des ouvriers réduits au chômage par l'aide généreuse du plan Marshall, voici Umberto D. : la misère des vieux dans la société capitaliste. "Dans une société, nous dit le scénariste lui-même, qui ne respecte ni l'homme ni la vieillesse, une société qui veut se fonder sur les seules mathématiques de l'argent, sur les seuls pourcentages et les seuls chiffres des bilans."
Pendant 30 années, employé dans un ministère, Umberto a servi loyalement l'Etat, mais l'Etat se moque de lui maintenant ; il a beau être seul, sans frères ni enfants pour l'aider un peu, la pension qu'on lui verse lui suffit à peine à faire vivre son chien, son seul ami, et la police motorisée du chrétien de Gasperi le repousse avec violence lorsqu'il manifeste timidement dans la rue pour une augmentation. A l'hôpital, les sœurs ne le gardent que quelques jours car il n'est pas assez mal, et encore, qu'il dise bien fort son chapelet ; sa logeuse le chasse et personne autour de lui ne peut ou ne veut le secourir, sauf la petite bonne Maria, presque aussi malheureuse et isolée que lui, malgré sa jeunesse… Finalement, comme tant de vieux dont nous apprenons tous les jours le suicide dans les journaux, Umberto se sent peu à peu acculé à la mort, et c'est uniquement parce que son chien, lui, ne veut pas mourir que, ne trouvant personne à qui le donner ou le vendre, et ne pouvant se résoudre à le laisser tuer à la fourrière, il se laisse aller de nouveau à essayer pauvrement de vivre, de vivre…
De vivre comment ? Le film ne le dit pas. Il est admirablement mis en scène et interprété avec une vérité minutieuse dans le moindre détail, une émotion souvent bouleversante (comme dans les scènes muettes du vieil
homme essayant de mendier, ou de la jeune Maria se rappelant au réveil
qu'elle est enceinte, que son enfant n'aura sans doute pas de papa, ni elle de mari, qu’elle n’a presque aucune perspective d'amour heureux).
Cependant, Umberto D. finit mal, reconnaît ZAVATTINI, ou plutôt il n'a pas de solution. Car pour moi, la solution aux problèmes d’Umberto c'est le public qui doit la donner. Le spectacle continue dans la salle, les spectateurs sont les acteurs qui dénouent le drame.
De quelle façon le spectateur que je suis peut-il dénouer le drame,
comme l'y invite ZAVATTINI ? En se disant : "Les pauvres vieux désespérés
comme le héros de ce film sont légion dans mon pays. Il faut donc lutter
pour que le monde leur soit meilleur." Alors le film désespéré aura au contraire une vertu tonique. Le rôle du cinéma serait de suggérer plus nettement ce dénouement et de montrer les germes d’espoir au cœur du
désespoir. ZAVATTINI et De SICA n'ont pas pu –ou peut être pas voulu– le faire. Le film s'en ressent d’ailleurs aussi sur le plan esthétique. Il est extrêmement lent, son récit est uniquement linéaire. Le cœur ne suffit pas à tout, si aimant soit-il. Dans l'art comme dans la vie, il n'y a pas de vraie grande œuvre sans action.
Pol Gaillard

Tragédie personnelle, tragédie d'une époque
Critique du Figaro, 15 octobre 1952

Voici la deuxième tragédie à un personnage présentée (dans la ligne de CHAPLIN) par Vittorio De SICA et Cesare ZAVATTINI. Déjà le héros du Voleur de Bicyclette connaissait une mésaventure qui, superficiellement banale, exprimait avec d'étranges résonances le drame de l'homme seul. Dans Umberto D. le principe est le même. Il s'agit du vieux retraité qu'une époque inhumaine condamne à déchoir dans la misère. Son destin laisse le reste du monde indifférent. Umberto Domenico Ferrare porte encore les habits de son ancienne condition bourgeoise. Il essaie de mendier et ne peut pas (c'est une des scènes les plus extraordinaires du film). Il devient la bête noire d’une logeuse louche qui voudrait le jeter à la rue. Ses anciens amis l'abandonnent. Une petite servante accorde à ce "maudit" un peu de compassion, mais limitée par un égoïsme juvénile, presque inconscient. Umberto n'a d'autre ami sur terre que son chien.
Voilà toute l'histoire. Où donc réside le mobile "tragique" ? Dans l'âme du héros, si bien fermée d'ailleurs que nul ne soupçonne les mouvements intimes. Nous sommes donc à l'opposé des conceptions théâtrales. Ici les protagonistes ne créent pas le drame par un jeu d'intrigues directes. Les liens entre eux et le héros sont invisibles. Nous n'arrivons à comprendre les affres du vieil homme que par l'intermédiaire de la caméra qui permet au cinéaste un insistant et minutieux travail d'analyse et nous permet de lire au-delà des apparences. Chose inconcevable sur une scène.
Avec l'art, le tact et l'intelligence du "vérisme" qu'on leur connaît, De SICA et ZAVATTINI parviennent à nous démontrer de cette manière que l'âme d'un passant anonyme peut recéler des secrets aussi bouleversants, aussi
dignes des soins du dramaturge que celle, plus spectaculaire, de Hamlet ou
de Macbeth. A cet égard, le Voleur de bicyclette, Umberto D. me semblent
ouvrir des tentatives d'une rare importance.
Le second film plus encore que le premier. Car ici nous trouvons un cas
moins "singulier" -je veux dire moins rare. Des milliers d’hommes connaissent aujourd'hui le sort de Domenico Ferrare. Ils ne furent jamais ni plus nombreux ni plus menacés par un déséquilibre économique devenu la maladie chronique du monde. Umberto D., ce n'est donc pas seulement la tragédie d'un personnage, mais la tragédie d'une époque.
Louis Chauvet

Tragédie personnelle, tragédie d'une époque
Critique du Figaro Littéraire, 18 octobre 1952

Umberto D., film admirable mais inégal et à divers titres manqué, nous paraît supérieur à bien des œuvres formellement plus parfaites, ne serait-ce qu'à Miracle à Milan, des mêmes auteurs. Vittorio De SICA est un des très grands hommes vivant du cinéma, et il existe peu de scénaristes auxquels l'art de l'écran doit autant qu'à Cesare ZAVATTINI. C'est compte tenu de cette double prééminence que j'avais cru nécessaire de faire de graves réserves sur Miracle à Milan, précisément. Le premier quart d'heure du film était d'une telle beauté et si profondément digne de Sciuscià et du Voleur De Bicyclette qu'il accusait la relative inauthenticité des séquences suivantes. Rien de semblable avec Umberto D., dont les faiblesses et les défaillances nous semblent elles-mêmes exemplaires, dans la mesure où elles témoignent de l'émouvante honnêteté d'une inspiration qui n'essaye pas de camoufler artificiellement ses manques.
Nos auteurs ont renoncé ici au néo-surréalisme de Miracle à Milan pour retrouver le néo-réalisme de leurs œuvres antérieures. Contrairement pourtant à beaucoup de films italiens dits néoréalistes, le scénario de Umberto D. apparaît centré autour d'un sujet dont la construction et le traitement sont classiques. Sujet que l'on serait du reste tenté de critiquer en raison de son peu contestable caractère mélodramatique, si on ne s'apercevait très vite que l'essentiel du film et son véritable apport sont ailleurs. Non pas dans l'histoire de ce retraité acculé par la misère au suicide, mais dans les innombrables détails de sa vie et de celle des êtres qui s'y trouvent plus ou moins mêlés. Dans Umberto D., c’est le sans importance qui est important.
Une jeune fille et un chien jouent dans l'action, mais en marge d'elle, un rôle presque aussi central que celui de Umberto Domenico Ferrari dit Umberto D. Et si le vieil homme lui-même nous émeut, c'est moins à cause
de la crise décisive qu'il traverse, thème apparent du film, que de ses faits et gestes familiers, recommencés depuis des années. Bref, sa façon de vivre nous intéresse davantage que sa façon de mourir. De même que nous
attachons plus de prix à la manière dont la jeune fille mal réveillée fait
devant nous, longuement, minutieusement, distraitement, le café matinal,
qu'à ses soucis de fille-mère. Non que nous ne participions aux angoisses de ce vieux fonctionnaire auquel sa retraite ne permet pas de vivre, ou au
désespoir de cette fille abandonnée : mais ce sont là des sujets faciles dont le pouvoir sur notre sensibilité est naturellement si grand que nous avons scrupule d'y céder. Tandis que l'amour d'un vieillard solitaire pour son chien, la monotonie, la vie d'une jeune bonne, des travaux ménagers chaque matin retrouvés, sont des sujets neufs, aussi bouleversants, pour qui sait voir, que les plus tragiques aventures. Mais nous savons voir pour cela seulement que Vittorio De SICA et Cesare ZAVATTINI nous ont ouverts les yeux. Le cinéma, art partiellement et peut-être même secondairement spectaculaire, nous révèle ici son éminente dignité, qui est de nous obliger à remarquer enfin ce qui nous crevait les yeux, oui, au point de nous rendre aveugles : la vie quotidienne ; la nôtre et celle des autres.
Mais il ne s'agit pas ici de notre existence à nous, pour le moment et
depuis si longtemps préservés. Il s'agit de la vie d'êtres qui ont faim, qui ont froid et qui sont seuls. Et c'est ici que Vittorio De SICA et Cesare ZAVATTINI gagnent définitivement la partie. Nous avions tendance à crier au mélo. Mais l'accumulation des détails vrais, montrés à neuf par des poètes, authentifie à mesure une histoire qui nous semble suspecte pour cette seule raison qu'elle nous avait été mille fois racontée de façon suspecte ; fausse parce qu’elle avait été dite d'une foi fausse. Ce qui est banal ne cesse pas pour autant d'être vrai. C'est un fait qu'un peu partout dans le monde, les petits retraités meurent à la lettre de la faim. Et que le désespoir submerge l'innocence trahie. Dans Umberto D., le mélo s'efface ; il reste le drame.
La seule vrai faiblesse du film est qu'il finit sur une pirouette. Vittorio D. est sauvé du suicide par son chien. Mais son nouvel amour de la vie est trompeur, puisqu'aucun problème n'est réglé et qu'il n'a pas plus qu'auparavant la possibilité matérielle de vivre. Quant aux temps morts de
l'œuvre, aux moments où le courant ne passe pas, ils sont, il faut le répéter, la rançon de l'honnêteté des auteurs, "qui tâcheront de faire mieux la prochaine fois". Il faut laisser ici la parole à ZAVATTINI. Il déclarait récemment à André BAZIN, lequel nous l'a rapporté dans les Cahiers du Cinéma : "Ce n'est point le principe esthétique qui est en cause (dans les défaillances de Umberto D.), mais seulement son usage. Plus le scénariste se refuse aux catégories dramatique et spectaculaires, plus il entend conformer son récit à la continuité vivante de la réalité, plus le choix des infimes évènements qui en font la trame devient délicat et problématique. Que je vous aie ennuyé avec l'angine d'Umberto, si je vous ai ému aux larmes avec le moulin à café de ma petite héroïne prouve seulement que j'ai su choisir la deuxième fois ce que je n'ai pas su imaginer la première."

Date de sortie : 1951 / Noir & blanc / 1 h 20 mn.
Réalisateur : Vittorio De SICA.
Scénario : Cesare ZAVATTINI.
Principaux acteurs : Carlo BATTISTI, Maria Pia CASILIO, Gina GENNANI...

I VITELLONI

Ce film est un des films de jeunesse de Federico FELLINI (il a alors seulement 33 ans). Le jeune FELLINI a jusque là collaboré à l'écriture de nombreux films de ROSSELLINI tels que Rome Ville Ouverte ou Paisa. Dans les Vitelloni (les inutiles), il nous narre l'histoire d'un groupe de désœuvrés traînant leur inutilité dans une petite ville de province. Ils ont la trentaine, sont entretenus tant bien que mal par leur famille. Ils ne savent pas très bien ce qu'ils voudraient faire, ils n'ont pas été au bout de leurs études et
attendent une hypothétique proposition qui les amènerait à Rome ou à Milan pour avoir une situation prestigieuse. Ce film laisse déjà paraître des thèmes chers à FELLINI. En effet, on y trouve le baroque, la fête, l'insolite à chaque coin de rue, tout en gardant une approche néoréaliste du cinéma
(approche que FELLINI délaissera par la suite). Cette œuvre reçut un accueil très chaleureux et fut acclamée à Venise, mais fut accueilli beaucoup plus froidement en France... en raison d'un doublage de mauvaise qualité semble-t-il.

I Vitelloni
Critique du Figaro, 29 avril 1954

A Venise, l'été dernier, nous avions vu sur l'écran du Lido un film charmant, I Vitelloni, réalisé par un jeune cinéaste italien, Frederico FELLINI. L'ouvrage évoquait un groupe d'oisifs traînant leur inutilité dans une petite ville : piliers de café, mythomanes au petit pied, rêveurs impénitents, quêteurs d'aventures entraînés parfois à commettre certaines extravagances. Personnages pitoyables et comiques, peints avec une ironie judicieuse et sans cruauté.
Le film est actuellement projeté sur un écran des Champs-Élysées. Il s'intitule en France Les Inutiles. J'ai bien failli ne pas le reconnaître. Les huit dixièmes de ses qualités originales ont disparu. Je m’empresse de préciser qu'il s'agit d'une coproduction. Vous avez compris ? Les rôles principaux furent confiés à des acteurs italiens (dont FELLINI lui-même). Quelques rôles épisodiques échurent à des français (dont Jean BROCHARD) qui, dans la version vénitienne étaient doublés ; inconvénient sensible mais relativement supportable.
A l'usage de notre public, on a poussé le travail beaucoup plus loin. BROCHARD parle sa propre langue. Mais les protagonistes italiens sont doublés en français. Résultat : navrant. La saveur de l'ouvrage tenait à l'ironie volubile des protagonistes, à leur langage, à leur accent. Le talent des acteurs visibles est remplacé par je ne sais quel baragouin de syllabes françaises tout au plus dignes d'un mauvais western. Certains gestes ou mimiques n'ont plus aucun sens. L'une des idées cocasses de l'auteur consistait à faire pleurnicher "comme un veau" tel ou tel de ses grands garçons. Les mêmes pleurnicheries traduites en français rendent un son navrant. On rit encore, mais cela frise l'emboîtage.
L'œuvre de FELLINI contient suffisamment de jolies qualités pour qu'après un tel massacre il en subsiste quelque chose. Elle n'arrive pas moins défigurée, méconnaissable. Et ce nouvel exemple prouve qu'il n'est plus possible de tolérer une technique aussi monstrueuse. Que l'on arrange comme on voudra les mélos bilingues du genre Fille Dangereuse. Mais lorsqu'un film présente un minimum d'intérêt, il faut choisir d’autres méthodes.
Louis Chauvet

I Vitelloni
Critique du Figaro Littéraire, 1er mai 1954

Les Vitelloni. Trompé par sa présentation sur un écran des Champs-Élysées, j'ai eu le tort d'aller voir la version française de ce film. Il faudra recourir à la copie italienne originale (qui passe dans une salle des
Boulevards) pour vérifier le bien fondé des compliments que reçut à Venise (en même temps qu’un prix) cette œuvre de Federico FELLINI. Telle qu'elle
m'a été présentée, elle est dénaturée par le plus malhabile doublage qui ait
peut-être jamais été enregistré. Il en résulte que la maladresse de la post-synchronisation contamine la mise en scène : le cinéaste est lui-même ridicule là où il prenait le ridicule pour sujet. Au lieu de sourire avec connivence de ses traits, la salle pouffe de rire à ses dépends. Un coup pour rien et que je vous dispense de jouer.

Date de sortie : 1953 / Noir & blanc / 1 h 43 mn.
Réalisateur : Federico FELLINI.
Scénario : Roberto ROSSELLINI, Max COLPET, Carlo LUZZANI.
Principaux acteurs : Franco FABRIZI, Franco INTERLENGHI, Eleonora RUFFO, Alberto SORDI...

Recueil constitué par Charles Blanchard et Adrien Charpentier
Corrections, rectificatifs et photos de Gersende Bollut

 

"Le Voleur de Bicyclette est un des premiers exemples de cinéma pur. Plus d'acteurs, plus d'histoire, plus de mise en scène, c'est-à-dire enfin dans l'illusion esthétique parfaite de la réalité : plus de cinéma"

André Bazin